lundi 21 juillet 2008

Considérations sur l'art poétique

Récemment, un cyber ami homosexuel m'a adressé un poème relatant une expérience sentimentale pénible parce que son partenaire était toxicomane. Mon cyber-ami a investi tout ce qu'il a pu (je parle de façon humaine, les sous qu'il a pu investir, on s'en fout) mais il a fini par admettre que c'était le tonneau des Danaïdes.

Il a convenu avec moi qu'on veut toujours essayer de sortir son partenaire de son mal-être, que l'amour sera plus fort. Malheureusement, il faut être pragmatique: la toxicomanie (aux substances illicites comme à l'alcool), c'est une maladie mentale comme une autre, il faut le soigner chez un professionnel de santé. Le malade refuse généralement d'aller chez le professionnel car c'est déjà une première étape psy de volonté de guérison. Il est plus facile, pour sa propre image et pour l'image sociale qu'on veut donner de ne pas aller chez le professionnel de santé. Pour sa dignité aussi. C'est un comportement caractéristique de la maladie mentale et le cercle vicieux se referme pour des années et des années. J'ai été dans ce schéma, on n'est pas beau à voir, il est difficile de s'en sortir, j'ai fait des psychothérapies (je pense que plusieurs thérapeutes peuvent être utiles, je pense que de longues périodes de non-consultation peuvent être utiles). Il est très pénible de voir d'autres s'y perdre quand on y a été confronté, on peut en devenir violent à vouloir préserver ceux pour qui on a de l'estime ou des sentiments. C'est peine perdue et c'est un crève coeur.

Le poème était magnifique mais il ne m'appartient pas, ce n'est pas à moi de forcer son auteur à le rendre public.

Son poème était donc superbe mais il se perdait dans des réalités très quotidiennes. Depuis, je vois l'art poétique très différemment. Il ne faut pas donner d'identité ni de spécificités de la vie de tous les jours aux personnages du poème. Et tout dans la suggestivité explicite. Comme dans le Dormeur du Val d'Arthur Rimbaud.

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

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