dimanche 27 janvier 2008

Digression historique (plus ou moins britannique)

Hier, je parlais avec une dame (je ne sais même pas son nom). Nous commentons les émissions "historiques" de France Inter. C'est très amusant parce qu'elle l'écoute en direct à la première diffusion alors que j'ai plus de trois mois de retard dans mes podcasts, donc je l'écoute avec un grand décalage. De quelles émissions s'agit-il ? (Le lien conduit vers la page officielle de l'émission vers laquelle vous pouvez télécharger l'émission et vous y abonner gratuitement).

La première émission, c'est 2000 ans d'histoire de Patrice Gélinet. La dame s'exaspère de cet animateur très partisan. Je n'ai pas trop remarqué. Je reprocherai plutôt à monsieur Gélinet d'être très sentencieux dans sa façon de raconter, le prof d'histoire un peu vieux jeu qui s'écoute à raconter la guerre antédiluvienne de 70. Ca manque d'allant, de pep's.

L'autre émission, c'est Rendez-vous avec X de Patrick Pesnot. Monsieur X serait un ancien des services secrets et il traite de l'histoire plus ou moins récente (toujours le XXe siècle apparemment ?), l'histoire plus ou moins internationale avec une perspective "tout ce que l'on peut bien nous cacher". La dame pense qu'il serait des services secrets. Son identité est toujours cachée pour rajouter au mystère. Est-il vraiment des services secrets ou un ancien de la maison ? Pas forcément. Il peut être très diplômé en histoire et lire la presse la plus pointue en la matière. Pour le profane, ça peut illusionner, je pense.

Avec cette dame, j'ai en commun d'avoir entendu une émission sur la famille royale britannique. Et je lui disais: "Mon Dieu, quelle vie de merde la reine Elizabeth a pu avoir! Mon Dieu que c'est ingrat". J'ai déjà eu l'occasion d'en parler auparavant avec d'autres personnes. Alors, les gens me disent: "Oui, mais elle vit dans un beau palais immense en plein coeur de Londres". Un biographe de la princesse Diana avait raconté la vie étriquée de la famille Windsor à Buckingham Palace. Le palais comporte plus d'une centaine de pièces mais ils vivent tous dans trois quatre pièces et il fallait faire attention à ne pas dépenser de l'électricité pour rien.

Une vie de merde parce que d'obligations (quand la princesse Diana a refusé de suivre cette vie d'obligations, elle a fait scandale). La reine aurait le droit de renoncer à son trône (elle a quand même 82 ans) mais elle a fait comprendre qu'elle s'y refuserait toujours. "Sincérité" ou devoir de respecter ses obligations à la vie, à la mort ?

A son âge, le corps ne répond plus toujours de façon aussi controlable qu'avant mais elle semble toujours assumer, si tant est qu'on lui permette. A son âge, elle pourrait légitimement avoir des lubies (gentillettes!) digne d'une vieille lady britannique indigne. Il faut lui reconnaître que ces dernières années, elle a "rajeuni", elle a un air plus avenant, de bonne grand-mère.

E IIE II


Comme je disais plus haut, les fantaisies de vieille dame, c'est pas pour elle. Pas le droit de mettre des chaussures ou une tenue pour être plus confortable lors d'une cérémonie, pas le droit un matin d'être plus fatiguée que les autres dames du royaume. Devoir mettre tous les ans la tenue d'apparat pour lire le Discours du Trône (=le programme du gouvernement pour le programme de l'année, discours écrit par le Premier Ministre mais lu par le monarque).

Speech from the Throne
La reine Elizabeth lors du
Discours du Trône en 2004

Contrairement à ce que cette dame pensait (la dame avec laquelle je parle des émissions de radio), la reine n'a aucun pouvoir, elle est en représentation permanente, elle n'est qu'une caution visuelle de son pays. Le Royaume-Uni est une démocratie parlementaire, toute personne qui n'est pas élue ou qui n'est pas nommée par une personne élue n'a aucun pouvoir politique, ce qui est le cas du monarque. Quand elle lit un discours, elle ne fait que lire un texte rédigé par le Premier Ministre. Quand elle remet des médailles, la liste lui en est remise par le Premier Ministre. Il est arrivé parfois que la reine n'apprécie pas son Premier Ministre mais elle doit s'y soumettre, c'est la volonté du peuple! (C'était le cas avec Margaret Thatcher, le premier ministre qui est resté le plus longtemps en poste sous son règne, 1979 - 1990). Dans ce cas, c'est alors la guerre au niveau du protocole et donc l'enfer pour les responsables du protocole et les conseillers. Il est déjà arrivé plusieurs fois à la reine de devoir se rendre auprès de chefs d'états étrangers qu'elle n'appréciait pas ou dont elle désapprouvait la politique.

Ma grand-mère paternelle (décédée à ce jour) a toujours connu une vie d'obligations, c'était dans l'ordre des choses à cette époque là. La femme était plus ou moins la soubrette de son mari, à la vie, à la mort, toute distraction, toute fantaisie, toute velléité d'indépendance devait être incorporée dans l'une des sept cases des pêchés capitaux. Une petite friandise aujourd'hui chez un grand chocolatier ? Péché de gourmandise. Prendre un taxi ? Péché de paresse. Il fallait arriver à la fin de sa vie (attesté par son âge à l'état civil) pour se dire que l'argent sur son compte en banque ne suivrait pas jusqu'au paradis pour oublier la tyrannie des péchés capitaux et s'autoriser une douceur ponctuelle, une promenade en taxi...

Dans la famille royale britannique, il y a deux personnes qui forcent mon respect pour avoir su vivre libres. Il y a Edouard VIII, devenu duc de Windsor. Pour la petite histoire, c'est lui qui a renoncé au trône (il a régné durant l'année 1936 sans jamais être sacré) pour épouser une américaine divorcée, Madame Wallis Simpson.

Duc & Duchesse de Windsor

La reine mère a "milité" comme une tigresse pour empêcher Edouard VIII de devenir roi, elle voulait être reine. Ah l'ambition! Et elle a toujours fait l'impossible pour que son beau-frère ne puisse jamais revenir sur le sol britannique. La reine Elizabeth était très lié à son oncle, le duc de Windsor, donc...

Reine mèreReine mère

Mais Edouard VIII n'aimait pas le protocole royal. En tant que prince héritier, prince de Galles, il avait dû honorer de sa présence un bal des débutantes qui l'ennuyait. Il a profité d'une fine pluie de rien du tout pour cesser la cérémonie. Ce fut un scandale monumental du fait des sommes investies par les familles pour la cérémonie.

L'autre personne, c'est la mère du prince Philip, duc d'Edimbourg. Cette femme s'appelait Alice de Grèce.

Alice de Grèce

Pour son époque, elle était considérée comme hippie. Elle était princesse mais elle allait aider les nécessiteux d'Athènes, pendant la deuxième guerre mondiale, contre tout protocole. Evidemment, elle ne s'est pas occupé de son fils qui est arrivé comme un miséreux à Buckingham Palace pour épouser la princesse héritière. (Pour l'anecdote, la princesse Elizabeth s'est mariée d'amour avec le prince Philip peu après la guerre, la réciproque est peut-être moins évidente. Le prince Philip était extrêmement impopulaire parce qu'il avait deux soeurs qui avaient épousé de hauts dignitaires nazis, on le suspectait d'avoir des sympathies nazies. Mais je crois qu'il a fait la guerre dans l'armée britannique car il savait qu'il allait épouser la princesse de Galles).

PS: Quelle est la différence entre la désignation "Royaume-Uni" et "Grande Bretagne" ? C'est une question de signification des mots. Le nom officiel du pays est "Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du Nord". Le royaume est dirigé par un roi, c'est l'entité administrative. Pourquoi uni ? Il a peut-être été nécessaire dans l'histoire britannique de nier des tiraillements identitaires (nationalistes ?) en insistant que le royaume était uni autour de son monarque. La Grande Bretagne par contre n'est qu'une notion géographique sans le moindre sens administratif et qui a Londres pour ville principale. Pourquoi l'Irlande se dit-elle Irlande ? Parce qu'à terme, elle voudrait unir l'entité géographique et l'entité administrative (mais de telles ambitions semblent être condamnées à jamais aujourd'hui).

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